Nostalgie 2 : Être Amazigh dans les années 80 .Texte de Jamal Boudouma ,traduit par Aziz Boufous.
L’élève Abaghous avait échoué en classe de cours préparatoires, parce qu’il n’arrivait pas à comprendre l’Arabe, l’année suivante il a quitté l’école et revint dans son lointain petit village .Nous ne le revîmes jamais plus depuis, mais nous nous persistâmes à malmener tout élève qui lui ressemblait, nous lancions des mots calomniateurs, du genre « chleh gleh ! »,(chleuh idiot !) sans raison, au visage de tout enfant parlant sa langue maternelle par mégarde.
Être Amazigh dans la logique de ces années là signifiait que tu étais marginal et pauvre et lorsque tu grandissais tu devenais comme ceux-là qui se rendaient au souk hebdomadaire en djellabas poussiéreuses, les yeux brillants et portant des turbans gris .Cela voulait dire aussi que tu habitais les recoins d’une ville pauvre aux rues misérables ,que tu étais un cancre à l’école et redoublais ta classe ,que le prof d’arabe te torturais parce que tu ne prononçais pas les mots comme il fallait ,et que tu allais précocement abandonner l’école pour devenir fellah,travailler dans la maçonnerie ,ou encore conduire une charrette tirée par un baudet. Mais si tu avais de la chance et poursuivais tes études, tu excellais en maths et habitais à l’internat. A la récréation tu te blottissais dans un coin quêtant un autre élève parlant ta langue pour murmurer quelques mots ou chantonner une mélodie triste que personne ne pouvait comprendre. Etre Amazigh en ces temps là ingrats signifiait que tu portais des chaussures en plastique dégageant une odeur infecte qu’on appelait « chaussures dostour » pour des raisons ,sans doute politiques, relatives au plan de crise qu’appliquait le pays du temps du « redressement structurel ». Être Amazigh signifiait que tu devais vivre de thé et de pain, que tes vêtements étaient rapiécés, que tu portais un tonneau et allais le remplir à la fontaine .Être Amazigh dans notre imaginaire enfantin déformé consistait à fumer à un âge précoce ,à passer chez les prostituées et à boire du gros rouge à chaque fois qu’il y avait une noce dans la ville ,comme cela consistait à adorer les chanteurs ,Rouicha ,Hadda Ouakki, le tambourin et les Chikhates…Être Amazigh voulait dire que tu ne devais parler que rarement et à mi-voix pour que personne ne te méprise, et renier tes origines, tes ancêtres et ta langue pour ne pas être la risée de tous les élèves ,car les leçon d’Histoire falsifiée nous ont appris que le Chleuh est débile …Comme ça sans aucune raison.
Être Amazigh dans la logique de ces années là signifiait que tu étais marginal et pauvre et lorsque tu grandissais tu devenais comme ceux-là qui se rendaient au souk hebdomadaire en djellabas poussiéreuses, les yeux brillants et portant des turbans gris .Cela voulait dire aussi que tu habitais les recoins d’une ville pauvre aux rues misérables ,que tu étais un cancre à l’école et redoublais ta classe ,que le prof d’arabe te torturais parce que tu ne prononçais pas les mots comme il fallait ,et que tu allais précocement abandonner l’école pour devenir fellah,travailler dans la maçonnerie ,ou encore conduire une charrette tirée par un baudet. Mais si tu avais de la chance et poursuivais tes études, tu excellais en maths et habitais à l’internat. A la récréation tu te blottissais dans un coin quêtant un autre élève parlant ta langue pour murmurer quelques mots ou chantonner une mélodie triste que personne ne pouvait comprendre. Etre Amazigh en ces temps là ingrats signifiait que tu portais des chaussures en plastique dégageant une odeur infecte qu’on appelait « chaussures dostour » pour des raisons ,sans doute politiques, relatives au plan de crise qu’appliquait le pays du temps du « redressement structurel ». Être Amazigh signifiait que tu devais vivre de thé et de pain, que tes vêtements étaient rapiécés, que tu portais un tonneau et allais le remplir à la fontaine .Être Amazigh dans notre imaginaire enfantin déformé consistait à fumer à un âge précoce ,à passer chez les prostituées et à boire du gros rouge à chaque fois qu’il y avait une noce dans la ville ,comme cela consistait à adorer les chanteurs ,Rouicha ,Hadda Ouakki, le tambourin et les Chikhates…Être Amazigh voulait dire que tu ne devais parler que rarement et à mi-voix pour que personne ne te méprise, et renier tes origines, tes ancêtres et ta langue pour ne pas être la risée de tous les élèves ,car les leçon d’Histoire falsifiée nous ont appris que le Chleuh est débile …Comme ça sans aucune raison.
Lorsque je suis arrivé à l’université ,j’ai rencontré des étudiants aux différents accents ,venus des quatre coins du pays ,et j’ai découvert finalement ,grâce àeux ,que je suis Amazigh,même si je ne connaissais dans cette langue que « aman », »aksoum », »aghroum » (respectivement :eau,viande,pain) …De même que j’ai connu des étudiants aux mines graves qui ne parlaient que l’Amazigh ou le Français ,détestent tout ce qui est Arabe et rêvent de l’Etat du grand « Tamazgha » .Leurs songes m’ont fait sourire mais je les comprends ,étais et en suis toujours solidaire …Peut-être mon ami Abaghous était-il l’un d’entre eux !
Texte paru en Arabe dans le quotidien Al massae n° 1502 du 21-07-2011.
Texte paru en Arabe dans le quotidien Al massae n° 1502 du 21-07-2011.
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