Une révolte pour la dignité ...pas uniquement pour le pain !

La révolte du fond qui a explosé dans la partie maghrébine donne ses fruits non seulement en Tunisie et en Algérie, mais également dans les pays limitrophes quelques pays du moyen Orient aussi ; ce qui signifie que la poigne de fer des pouvoirs Arabes est en train de s'user sous les coups de boutoir des manifestations populaires coléreuses. Ceci n'est pas une révolte pour le pain, même si la faim et le chômage sont deux facteurs principaux dans son éclatement, c'est une révolte d'honneur, un soulèvement contre l'humiliation et la succession des offenses qui ont atteint et continuent de toucher l'homme Arabe durant les trois dernières décennies.


Et si certains peuples non-arabes ou non-musulmans fuient les systèmes despotiques et l'oppression vers la séparation et l'autodétermination après l'incapacité de la coexistence ou par suite d'une intervention extérieure, voire le recours à une alliance avec Israël, comme c'est le cas au Sud du Soudan, et à un degré moindre au Kurdistan irakien, que vont donc faire les peuples arabes opprimés ? L'indice le plus important qu'il est possible de déduire de ces dernières manifestations est que la culture de la peur imposée par les pouvoirs aux peuples durant les dernières décennies, a été ébranlée pour ne pas dire démolie, et que les pouvoirs commencent à vérifier leurs calculs sérieusement pour la première fois ,et accordent du crédit à l'opinion publique arabe ,tant ignorée et méprisée .

Ainsi a-t-il été digne d'intérêt le recours du gouvernement à revoir à la baisse de presque la moitié des denrées essentielles, dans une tentative de circonscrire et réduire la tension, tandis que son homologue tunisien est allé encore plus loin quand le président Ben Ali a promis de consacrer 6 milliards de dollars à la création de 300 mille emplois au bénéfice des diplômés chômeurs pour les deux prochaines années ,et a promulgué une loi exonérant les nouveaux projets d'investissement de tous les impôts pour intégrer encore plus de chômeurs et réactiver l'économie productive .

De même n'a-t-il point été surprenant que les autorités libyennes aient pris l'initiative de procédures préventives pour dissuader les chômeurs de descendre dans la rue et les immuniser contre le "virus" bénin de la révolte tuniso-algérien, en détaxant tous les produits alimentaires tels que le sucre, le riz, l'huile, les pâtes et les farines.
Le chômage en Libye atteint des moyennes de plus de 20% parmi les jeunes, selon les estimations les plus réactionnaires. Dans un pays qui encaisse environ 50 milliards par an de recettes du pétrole et possède un excédent budgétaire dépassant 200 milliards de dollars dont le pouvoir ignore le mode de les investir. Le gouvernement jordanien ,qui avait tourné le dos à toutes les mises en garde de la gauche et a insisté sur la suspension de la subvention des produits de première nécessité l'institution de nouveaux impôts et l'alignement total sur les consignes du F.M.I. de faire flotter les prix ,a fini par pressentir le danger , est descendu de ses nimbes, a abandonné son obstination et a pris des mesures urgentes de baisse des prix pour apaiser la rue , absorber sa colère et avorter une gigantesque marche protestataire prévue par les syndicats après la prière du Vendredi suivant .

Deux faits qui devraient attirer l'attention de tout observateur de ces protestations, le premier est le silence des occidentaux et des Européens, surtout de l'autre rive de la Méditerranée, et le second est l'abstention d'autres pays ,vivant une tension interne semblable ,tels que le Maroc, la Syrie, l'Egypte et le Yémen ,de prendre des dispositions identiques pour alléger la souffrances des citoyens . Nous comprenons le silence occidental, car ces pays qui se sont levés contre la flagellation d'une femme au Soudan, ont remué ciel et terre contre le verdict de lapidation d'une prostituée en Iran ,ne désirent aucun changement dans la région arabe et spécialement dans les pays du Maghreb après qu'ils aient ratifié des contrats avec ces pays concernant la lutte de ces régimes contre les deux plus grands dangers qui menacent l'Europe ,le premier étant l'intégrisme islamique et ses organisations et le second qui consiste en la lutte contre l'émigration clandestine . En contrepartie les pays européens protègent les régimes en place et ferment les yeux sur les violations des droits de l'Homme et sur l'absence de démocratie et des libertés dans leurs pays.

Mais ce que nous ne comprenons pas c'est le fait que d'autres pays arabes n'aient as pris les mêmes initiatives que la Jordanie et la Libye avant de se retrouver dans la situation de la Tunisie et de l'Algérie ,peut-être pire ,même si nous pensons que ces mesures préventives pourraient être temporaires et limitées ,tout en ne garantissant pas l'annulation de l'explosion . La question fondamentale qui se pose actuellement avec acuité, et au vu des concessions hâtives accordées par certains pays arabes, que ce soit pour calmer les revendications ou bien pour empêcher que des évènements semblables n'arrivent dans leurs Fiefs, cette question est : Pourquoi donc ces régimes négligeaient ou encore n'accordaient aucun intérêt à la souffrance de leurs citoyens durant toutes ces années, alors qu'ils possèdent des richesses et des excédents financiers, de même qu'ils possèdent des services de renseignements qui guettent le moindre geste dans la rue et remplissent les prisons d'opposants ,voire de ceux là même qui ne font à penser à l'opposition.

Si les autorités tunisiennes étaient capables de créer autant de postes d'emploi promis (300 000 sur deux ans), reconnaissaient la légitimité des revendications et leur logique, le ministre de l'information ayant assuré que le message était compris, pourquoi n'avaient-elles pas fait tout cela avant, et ont attendu pour résoudre la crise que le jeune mohammed El bouzidi s'immole par le feu devant le siège de la préfecture ? Lui qui, à propos, mérite qu'une statue commémorative lui soit érigée pour son sacrifice.

Et puis pourquoi le pouvoir algérien a-t-il permis la hausse vertigineuse des prix des produits de base pour accentuer la souffrance des pauvres, lui qui se trouve assis sur un excédent de 150 milliards de dollars et réalise de recettes annuelles pour la vente du pétrole et du gaz ,de 55 milliards de dollars ?
(à suivre)
Texte publié initialement en Arabe dans le quotidien Al massae du 15/16-01-2011

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