La nouvelle constitution :Naissance d'un jour nouveau, ou un espoir déçu?
Driss Ben Ali
"Il est insensé que les hommes combattent pour demeurer esclaves ,comme si l'esclavage était ,pour eux ,un honneur !" Etienne de La Boètie .
Driss Ben Ali est professeur d’économie et directeur de recherche à la Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales à l’Université Mohammed V à Rabat, au Maroc.
"Il est insensé que les hommes combattent pour demeurer esclaves ,comme si l'esclavage était ,pour eux ,un honneur !" Etienne de La Boètie .
La constitution a été plébiscitée avec plus de 98%.Ce chiffre est la première donnée à avoir suscité l'attention des observateurs étrangers ...on y ressent les relents du sous-développement .Nous avons le sentiment que les marocains préfèrent acheter leur paix et leur sécurité au prix de l'esclavage .Il paraît que la société entière est devenue moins exigeante quand il s'agit de la citoyenneté,il en a perdu le goût et l'idée et ne peut plus la bien utiliser .Partant de là les espoirs des gens se limitent aux réformes au lieu de réclamer les droits .De manière générale ces gens préfèrent la soumission à la résistance ,ce qui signifie ,pour certains observateurs que le peuple n'est pas prêt pour se mouvoir spontanément . Et dans ce cas d'autres se chargent de cette tâche par procuration .
Il n'est pas possible dans ce cas de ne pas poser la question suivante :"pour quoi l'émergence et l'activation de la citoyenneté positive demandent du temps au Maroc? Pourquoi le marocain continue-t-il à se comporter comme une créature soumise et suiviste dans un monde qui exige ,plus qu'en aucun autre moment,l'affirmation de soi ,l'indépendance du pouvoir et la participation libre et responsable du citoyen dans la gestion de l'Etat ? Qui faudrait-il incriminer et condamner ?
Faut-il incriminer le pouvoir politique parce qu'il a privé les citoyens ,depuis longtemps ,d'adorer la liberté de la nécessité de faire entendre leurs voix ,et de toutes les occasions d'actions en masse ? Faudrait-il incriminer l'élite d'avoir toujours méprisé les masses et de ne pas hésiter à imaginer le peuple comme un ensemble d'individus inconscients et irresponsables qu'il faut défendre ?
Faut-il incriminer la culture et l'enseignement du pays qui ne produisent que des individus tyranniques ou soumis ,inadaptés en tous cas à vivre dans une société libre et émancipée ?
La réalité actuelle nous interpelle avec insistance et nous impose d'aller plus loin que la simple observation afin de révéler certaines vérités ,non pas à un rythme décourageant toute volonté car " il ne faut surtout pas dire à une nation qu'elle ne mérite pas la liberté " comme disait Alexis de Tocqueville .
Il faut dire que les individus ,dans une société telle que la nôtre ,demeurée pour longtemps soumise à la tutelle de l'Etat,ne sont aptes qu'à abaisser la tête et ne ne pensent à rien d'autre qu'à la soumission face au pouvoir.Ils sont plus enclins à se protéger avec une passivité primitive privée de tout mérite relatif aux affaires publiques ...on désencourage toute aspiration commune ou besoin partagé de l'action .
L'Etat makhzènien a toujours renié à la société aspiration à l'indépendance ainsi que toute entrée libre à la responsabilité (le Maroc n'a connu que des constitutions octroyées ) .Disons qu'il a emprisonné les citoyens dans leur vie privée et a oeuvré à les isoler les uns des autres pour les maîtriser .
Dans ces conditions il n'y a de place qu'à des aspirations "flétries"qui aident à dévier l'attention des gens des affaires publiques .Rien n'est constant dans un milieu pareil où tout le monde est obsédé par le l'ambition de de s'élever dans les fonctions et la crainte d'échoir dans l'abîme .
Et du moment que l'argent est devenu actuellement le critère essentiel dans le classement des hommes,dans l'établissement de distinctions entre eux ,tout en leur donnant une dynamique toute particulière ,changeant de main et variant les conditions des individus, élevant les familles ou les rabaissant;il n'est pas de personne qui qui ne soit contrainte à fournir des efforts pour garder cet argent ou en gagner .Le désir de s'enrichir à n'importe quel prix et la quête du bonheur et du luxe matériel sont devenus la monnaie la plus courante .Ce sont les règles d'un jeu qui éloigne les individus de l'intérêt général et et les pousse à s'intéresser aux affaires publiques et les biens publics deviennent source d'enrichissement et de réalisation de projets individuels .C'est ainsi que nous voyons des hommes qui acquièrent leur position sociale par la soumission au moindre subordonné représentant l' autorité politique .Et tant qu'ils délaissent leur liberté , leur noblesse et toute source de fierté, ils seront investis de fonctions qu'ils sont inaptes à assumer .
Tout le monde parait inquiet et fournit des efforts pour assumer la responsabilité .Mais dés qu’il atteint son objectif il se transforme en carnassier se nourrissant de ses proies.
La situation est telle qu’on a imposé une société et un peuple, dont la seule élite sont les fonctionnaires publics ,une administration unique et forte ,gérant l’Etat et tenant sous tutelle les individus .La volonté du Makhzen de tout maîtriser l’a conduit à isoler le marocain dans une marge d’indépendance assez restreint tout en le privant de la citoyenneté.
Cependant, est il possible de parler d’une nouvelle ère ,d’une ère dynamique après cette réforme de la constitution ? Et qu’est-ce que nous pourrions attendre ? Qu’est-ce qui va changer dans notre vie politique ou quotidienne ?Comment seront les relations entre gouvernants et gouvernés ?Quel sera le comportement des élites politiques ?Et quid de la jeunesse qui ravivé l’activité de nouveau ?Et quels seront ses sentiments dans les jours à venir ?Le désespoir, la révolte ou le boycott ? Bref,le Maroc marche –t-il vraiment dans la voie de la démocratie et de la modernité ?
Il n’existe pas de réponses évidentes à ces questions insistantes. Si l’itinéraire suivi paraît être connu, pour certains , l’horizon clair et l’avenir florissant ;d’autres pensent que nous avons ouvert les portes de l’avenir en faisant un pas en arrière. Et ce genre de mouvement a eu des répercussions opaques sur notre parcours historique et risque de nous jeter sur des rives inconnues exemptes de tout moyen de sauvetage .
En tous cas une chose est certaine,c’est que le Maroc, après cette réforme et les évènements qui l’ont précédée et l’ont engendrée ne pourra plus retourner aux pratiques d’antan, ni se servir des Hommes et des figures qui le symbolisent. La culture politique -qu’animent actuellement des notables voraces ,des politiciens obscurs ,des makhzéniens passéistes ,des technocrates belliqueux, des arrivistes sans principe dissuasif, et des leaders sortant de l’ombre pour récolter les fruits –cette culture doit céder la place à une autre.
Cette catégorie est incapable de diriger la société marocaine sur la voie de l’épanouissement et de la modernité .Il faut qu’elle prenne l’initiative de définir ses points faibles afin de donner un sens à son action, chose qu’elle ne peut, ou refuse, de faire.
Le jeu des ambitions personnelles ,qui a ouvert la voie à des partis domestiqués ou a des courants moins influents dirigés par des potentats qui ont réussi à mêler leurs conflits personnels à la vie politique avec une overdose de sentiments anormaux, ne requérant aucun engagement ,est appelé actuellement de céder la place à d’autres forces : des élites indépendantes, des partis porteurs de projets ,des jeunes engagés, des femmes insoumises, des représentants crédibles ,et une véritable opposition.
C’est ce que devraient comprendre les élites politiques traditionnelles…Elles sont appelées à déduire des conclusions .On devrait leur signifier clairement qu’elles n’ont rien à ajouter à la vie politique et que par conséquent elles doivent céder le terrain à d’autres. Dorénavant l’ennemi est représenté par le passé ,cette vie politique misérable qui permis à des individus faibles et sans valeur de dominer le terrain. Nous pourrions aussi nous approvisionner de ce passé de quoi féconder l’avenir et transformer consciemment ces mauvais coups en autant d’atouts pour notre progrès.
En ce qui concerne la monarchie ,pourrait-elle fournir un effort susceptible d’en faire l’acteur principal dans cette nouvelle transformation que requiert la société ?
Oui ,elle s’est débarrassée du tapis de la violence makhzènienne et perd par l’oppression et l’autorité ce qu’elle gagne par la douceur ,c’est ce que nous récolterons le jour où nous abandonnerons la « bei3a » au profit de l'allégeance, et joignons le traditionnel au nouveau, remplaçons l’assujettissement par la citoyenneté et effaçons l’individu par l’esprit de la communauté.
Cependant le style adopté par le makhzen et ses pratiques auxquelles sont soumis les marocains ne vise pas à réaliser ces finalités.Son objectif principal ,consiste ,par contre,à les maintenir soumis à l’autorité.
Il s’agit pour nous ,en tant que marocains ,d’un rendez-vous qu’on ne peut rater ,dans un monde arabe renouant ses liens avec l’Histoire.Nous devons donner une réponse claire à une question primordiale : Comment pénétrer dans l’univers de la modernité ? qu’est ce que nous sommes tenus de faire ?
Nous nous sommes longtemps suffis d’attendre, Le Maroc n’a rien réalisé d’autre, depuis son indépendance ,que l’attente .Le peuple marocain a démontré qu’il possède d’énormes réserves de patience .Mais il serait irresponsable si l’idée se propageait que ces réserves étaient intarissables et que cette patience était sans limites .(à suivre)
Nous avons enfin compris : Le modèle actuel d'une société dominée par un Etat fortement présent dans la vie des gens et des choses ,une population soumise et aliénée et une élite domptée, sans crédibilité,et non viable et ne répondant pas aux aspirations d'une jeunesse quêtant la rupture avec le sous-développement et l'entrée dans l'univers de la modernité .L'heure du changement a sonné !
Pour atteindre cette finalité il est inévitable de s'armer de courage ,de reprendre du souffle,puis faire suivre par une forte secousse .Il est impossible d'obtenir quoi que ce soit sans volonté et sans obstination,de même que l'image mélancolique du Maroc reliée aux traditions le pousse à donner de lui une image archaïque ,devenu impératif qu'elle cède la place à un Maroc moderne .
Notre pays a besoin de renouer avec une expression nouvelle et authentique avec notre politique et notre culture. Nous avons besoin d'abandonner la manière vétuste de voir les choses ,les modes de pensée obscurs et autres modèles anciens qui anesthésient et inhibent l'action politique .Tout le monde ressent un besoin insistant et et urgent de changement. Il faut donc renouer avec la politique dans sons sens noble .Et tant que nous ne mettons pas à niveau la politique par d'autres comportements ,tant que nous ne renouvelons pas notre engagement et donnons un sens à nos actions ,nous ne pouvons pas prétendre édifier les bases d'un Maroc libre et moderne ,il est aussi envisageable plutôt que la réalité mêle les cartes des Hommes de ce pays et les mette devant le fait accompli.
Il est donc impératif de trouver les réponses aux questions suivantes :
-Que faire pour que le Maroc se débarrasse des résidus traditionnels (makhzèniens) qui pèsent sur ses épaules et l'empêchent d'accéder à la modernité?
Que faire pour permettre aux marocains d'avoir accès à la citoyenneté vraie et positive et rompre avec l'état de sujets manipulés ?
Que faire pour rompre avec un système néo-traditionaliste basé sur les privilèges et le lucre ?
Que faire pour doter le pays d'une justice plus équitable et plus efficiente ?
Que faire pour rendre efficaces et crédibles les nouvelles institutions ?
Que faire pour réadapter l'activité politique et permettre à une élite indépendante ,dynamique et engagée de renouer avec la politique et avoir une fonction motrice dans la société .
L'heure de la vérité a sonné donc .Notre jeunesse comprend et est consciente ,plus qu'en aucun autre temps que les prémisses de son avenir se définissent par une décision à prendre aujourdh'ui,et pour cela fait pression afin que son destin soit décidé aujourd'hui même et non pas demain ,et pousse dans le sens d'un Maroc démocratique ,moderne et respectueux de la personnalité humaine .
Dans ce contexte le devoir des dirigeants et et de la classe politique de manière générale ,consiste à saisir cette occasion pour alléger les dégâts d'un système arrivé dans l'impasse.
En réalité ,la jeunesse marocaine est appelée à des changements importants pour mettre fin à l'incertitude qui prédomine chez une large majorité de cette catégorie .La jeunesse marocaine a le sentiment que sa vie va perdre son sens au cas où se réduirait sa foi en un lendemain plus prospère et plus libre .
Nous avons enfin compris : Le modèle actuel d'une société dominée par un Etat fortement présent dans la vie des gens et des choses ,une population soumise et aliénée et une élite domptée, sans crédibilité,et non viable et ne répondant pas aux aspirations d'une jeunesse quêtant la rupture avec le sous-développement et l'entrée dans l'univers de la modernité .L'heure du changement a sonné !
Pour atteindre cette finalité il est inévitable de s'armer de courage ,de reprendre du souffle,puis faire suivre par une forte secousse .Il est impossible d'obtenir quoi que ce soit sans volonté et sans obstination,de même que l'image mélancolique du Maroc reliée aux traditions le pousse à donner de lui une image archaïque ,devenu impératif qu'elle cède la place à un Maroc moderne .
Notre pays a besoin de renouer avec une expression nouvelle et authentique avec notre politique et notre culture. Nous avons besoin d'abandonner la manière vétuste de voir les choses ,les modes de pensée obscurs et autres modèles anciens qui anesthésient et inhibent l'action politique .Tout le monde ressent un besoin insistant et et urgent de changement. Il faut donc renouer avec la politique dans sons sens noble .Et tant que nous ne mettons pas à niveau la politique par d'autres comportements ,tant que nous ne renouvelons pas notre engagement et donnons un sens à nos actions ,nous ne pouvons pas prétendre édifier les bases d'un Maroc libre et moderne ,il est aussi envisageable plutôt que la réalité mêle les cartes des Hommes de ce pays et les mette devant le fait accompli.
Il est donc impératif de trouver les réponses aux questions suivantes :
-Que faire pour que le Maroc se débarrasse des résidus traditionnels (makhzèniens) qui pèsent sur ses épaules et l'empêchent d'accéder à la modernité?
Que faire pour permettre aux marocains d'avoir accès à la citoyenneté vraie et positive et rompre avec l'état de sujets manipulés ?
Que faire pour rompre avec un système néo-traditionaliste basé sur les privilèges et le lucre ?
Que faire pour doter le pays d'une justice plus équitable et plus efficiente ?
Que faire pour rendre efficaces et crédibles les nouvelles institutions ?
Que faire pour réadapter l'activité politique et permettre à une élite indépendante ,dynamique et engagée de renouer avec la politique et avoir une fonction motrice dans la société .
L'heure de la vérité a sonné donc .Notre jeunesse comprend et est consciente ,plus qu'en aucun autre temps que les prémisses de son avenir se définissent par une décision à prendre aujourdh'ui,et pour cela fait pression afin que son destin soit décidé aujourd'hui même et non pas demain ,et pousse dans le sens d'un Maroc démocratique ,moderne et respectueux de la personnalité humaine .
Dans ce contexte le devoir des dirigeants et et de la classe politique de manière générale ,consiste à saisir cette occasion pour alléger les dégâts d'un système arrivé dans l'impasse.
En réalité ,la jeunesse marocaine est appelée à des changements importants pour mettre fin à l'incertitude qui prédomine chez une large majorité de cette catégorie .La jeunesse marocaine a le sentiment que sa vie va perdre son sens au cas où se réduirait sa foi en un lendemain plus prospère et plus libre .
Texte de M.Driss Ben Ali , paru initialement en Arabe dans le quotidien "Al massae" n° 1489,du mercredi 06/07/2011.
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