Les maladies transmises par l'animal à l'Homme.
La rage |
La rage est une Maladie Légalement Réputée Contagieuse, soumise à une déclaration obligatoire à la Mairie et aux Services Vétérinaires. C'est une maladie mortelle : d'après l'OMS, entre 35.000 et 50.000 personnes meurent chaque année de la rage dans le monde, c'est la dixième des maladies infectieuses mortelles, plus de personnes meurent de la dengue, la poliomyélite, la méningite méningoccique ou l'encéphalite japonaise. La France métropolitaine est déclarée indemne de rage sylvatique (transmise par les animaux carnassiers tels le renard et le chien), aucun décès humain n'est à déplorer depuis 1924. Mais la rage continue de circuler parmi les chauve-souris... et en août - septembre 2004, les médias en ont beaucoup parlé, des hommes et des animaux risquaient d'avoir contracté la rage à cause d'un chiot illégalement importé. La rage est endémique, c'est à dire qu'elle sévit régulièrement dans certaines régions d'Europe. Elle peut parfois atteindre le stade épidémique. |
Un peu d'histoire... Le mot rage trouve son origine dans la langue sanskrite, 3000 ans avant Jésus Christ : " Rabhas . La rage canine (= du chien) et la rage lupine (= du loup) sévissent, créant une véritable phobie parmi les hommes : un humain mordu par un chien ou un loup se suicidait ou était tué par ses pairs. En 1810, dans une petite ville de Meuse, un loup enragé mordit 40 personnes qui moururent toutes. Duboue, qui avait compris qu'un micro-organisme chemine par voie nerveuse depuis le lieu de la morsure jusqu'au cerveau, avait reproduit la maladie chez le lapin en inoculant le virus dans le cerveau. Louis Pasteur fut admiré de tous le 6 juillet 1885, quand il soigna Joseph Meister, jeune berger mordu par un chien enragé. La dernière épidémie de rage (et le dernier humain mort de rage en France) remonte à 1924 en Côte d'Or. |
Le virus responsable de la rage
Le virus responsable appartient à la famille des Rhabdovirus (rhabdo : baguette) et au genre Lyssavirus (lyssa de la racine lud : violent).
Le virus de la rage observé au microscope électronique à transmission
Le virus de la rage peut avoir trois formes : une forme allongée en obus, une forme ronde, une forme filamenteuse. Il mesure en moyenne 75 nm de diamètre pour une longueur variant de 130 à 300 nm. Il est constitué :
C'est un virus fragile, il ne peut survivre que très peu de temps à l'extérieur de l'hôte et est détruit par :
Il est inactivé par :
Il est par contre résistant à la putréfaction et peut-être conservé par le froid, la lyophilisation et la glycérine à 50%. |
Les animaux qui peuvent transmettre la rage
Tout animal à sang chaud peut contracter la rage :
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Comment peut-on être contaminé ?
Le virus est retrouvé dans les tissus des animaux enragés (système nerveux, sang, glandes salivaires, surrénales…), dans la salive (sa concentration y augmente avec le temps). Le lait, l'urine, la sueur, les larmes, le mucus nasal, les fèces semblent avoir un rôle minime dans la transmission.
La transmission de la maladie se fait par introduction du virus contenu dans la salive (ou le sang) d'un animal atteint de la rage :
Le virus ne traverse pas la peau saine mais traverse les muqueuses saines.
La manipulation d'animaux morts peut être contaminante, car le virus garde sa virulence dans le cadavre pendant un certain temps. |
Les symptômes de la rage
Après morsure, le virus pénètre dans les cellules musculaires proches où il se multiplie activement. Pour pouvoir pénétrer dans des cellules et s'y multiplier, les virus doivent se fixer sur la membrane des neurones grâce à des récepteurs précis existant sur cette membrane : dans le cas du virus de la rage, son récepteur est le récepteur nicotinique à l'acétylcholine. Le virus gagne les centres nerveux en cheminant le long des axones ou dendrites des nerfs périphériques. Cela peut prendre plusieurs semaines pendant lesquelles la personne ou l'animal contaminée ne sent absolument rien : ce temps correspond à la période d'incubation. Une fois dans un centre nerveux, le virus se multiplie à nouveau, détruisant les cellules nerveuses. Il reprend alors le chemin inverse (septinévrite), gagne les ganglions sous-muqueux de la langue et les canaux salivaires : à partir de là, son rejet à l'extérieur avec la salive assure sa dissémination. Il se répand également dans tout l'organisme (poumons, reins, pancréas…). Une fois les symptômes apparus, l'évolution de la maladie se fait inexorablement vers la mort.
Chez l'homme Le temps d'incubation dépend de la dose de virus inoculée, de la localisation et de la gravité de la plaie : il varie de 5 jours à plusieurs années et est d'autant plus court que la plaie est proche du système nerveux ou d'une zone où il y a de nombreux nerfs. Les symptômes apparaissent en moyenne 20 à 60 jours après l'exposition.
Quatre cas de survie après une maladie déclarée ont été rapportés : les patients, qui avaient été vaccinés, ont gardé de très lourdes séquelles physiques et psychiques.
Chez le renard L'incubation dure de 20 jours à plusieurs mois pendant lesquels l'animal ne présente aucun symptôme. Le virus envahit alors le cerveau puis passe dans la salive : à cette étape, bien que pouvant théoriquement transmettre la maladie, le renard ne cherche encore pas à mordre. La maladie se déclare entre le 26ème et 30ème jour : le renard, qui a perdu toute crainte de l'homme, se rapproche des maisons cherchant à mordre tous ceux qu'il rencontre. Peu de temps après, il meurt d'encéphalite et de paralysie. On dit souvent qu'il ne faut pas consommer les fraises des bois à cause du risque de rage mais il faut savoir que, même si la salive du renard enragé va sur une plante comestible par l'homme, cela ne présente pratiquement aucun risque : le virus craint fortement l'air, la lumière et la chaleur du soleil et qu'il lui faut une véritable voie d'accès pour atteindre un nerf. C'est d'autres maladies qu'on risque de contracter, comme l'échinococcose.
Chez le chien L'incubation dure 2 semaines à 3 mois voire un an. Les premiers signes sont un changement de comportement : l'agressif devient doux et vice-versa. Inquiet, le chien refuse sa nourriture habituelle et se met à chasser des mouches invisibles. La maladie se déclare au bout de deux jours et peut prendre deux formes différentes.
Chez le chat Le chat recherche l'obscurité et émet des miaulements plaintifs. Il se paralyse très vite et meurt en 3 à 4 jours.
Chez les bovins L'incubation dure environ 2 mois. L'animal émet fréquemment des meuglements rauques et impressionnants et devient très excité attaquant même ceux qui l'approchent. Sa déglutition devient très difficile, il se paralyse et meurt en 3 à 6 jours.
Chez le rongeur L'incubation très longue est suivie d'une phase pendant laquelle l'animal présente des troubles nerveux :
La mort survient très rapidement. |
Le diagnostic de la rage
Le diagnostic peut être réalisé à la phase de rage déclarée par des laboratoires spécialisés à partir de prélèvements salivaires, d'une ponction lombaire, de biopsies. Le diagnostic peut être confirmé à l'autopsie (chez l'homme et chez l'animal).
Selon les circonstances, les conduites à tenir sont différentes : Animal non disponible -> Traitement antirabique mené jusqu'à son terme (Envers le blessé) Animal disponible mort -> Acheminer par la direction des services vétérinaires l'encéphale de l'animal dans un laboratoire agréé pour analyse et Envers le blessé Traitement antirabique à interrompre si analyse négative Animal vivant non suspect -> Mise sous surveillance vétérinaire de l'animal, Examens à J0, J7, J14 et Envers le blessé Décision de traitement différé Animal vivant suspect -> Mise sous surveillance vétérinaire de l'animal, Examens à J0, J7, J14 et Envers le blessé Traitement antirabique immédiat (interrompu si la surveillance vétérinaire infirme les doutes initiaux). La présence du virus ne peut être détectée par analyse de sang classique. Il est donc primordial d'effectuer des prélèvements et de les soumettre à analyses. Le diagnostic est effectué par un vétérinaire dans les plus grandes précautions (blouse de laboratoire s'attachant dans le dos et serrée aux poignets, gants Kevlar résistants aux morsures, écran facial ou masque muni d'un filtre HEPA) : il est capital pour la santé publique. Il permet d'identifier le virus dans les tissus infectés mais également de surveiller la population canine et la faune sauvage. En France, pour les animaux suspects de contamination humaine abattus ou décédés pendant la période de mise sous surveillance vétérinaire, les prélèvements sont adressés par les directions départementales des services vétérinaires ou par les écoles nationales vétérinaires aux services compétents à des fins d'analyse. Il en est de même pour les prélèvements humains de malades présentant des signes évoquant une encéphalite virale sans étiologie précise recueillis par les services de maladies infectieuses, de neurologie ou de réanimation. Trois techniques différentes sont utilisées pour analyser les prélèvements : -l'immunofluorescence directe sur des calques cornéens ou de tissus nerveux, frottis de muqueuse linguale ou de biopsies cutanées avec recherche des antigènes viraux - isolement du virus sur culture de neuroblastomes de chauves-souris - recherche immuno-enzymatique d'antigènes rabiques Sur l'homme vivant, les techniques utilisées sont : -la mise en évidence de l'ARN viral par RT-PCR (Reverse Transcriptase-Polymerase chain reaction) à partir de la salive et du liquide céphalorachidien du patient - la recherche d'inclusions virales au niveau d'une biopsie cutanée - la recherche d'anticorps rabiques dans le sérum et le liquide céphalorachidien par technique de séroneutralisation cellulaire (seule technique de référence) et méthode ELISA. |
Le traitement de la rage
Il n'y a pas de traitement curatif de la rage, une fois celle-ci déclarée. Il existe par contre un traitement après exposition au risque rabique qui consiste en une vaccination et qui fait apparaître une protection avant que la maladie ne se déclare. Dans certains cas, on associera un traitement par des immunoglobulines spécifiques. Ce traitement séro-vaccinal sera réalisé dans les centres antirabiques.
Traitement pré-exposition : vaccination préventive Chez l'homme, la prévention passe par la vaccination. Traitement post-exposition : vaccination curative Le traitement de la rage est efficace s'il est commencé rapidement. Si on pense avoir été contaminé : laver la plaie ou la zone contaminée (zone de léchage, écorchure, morsure, griffure, de dépôt de salive) à l'eau savonneuse et rincer abondamment ; désinfecter la plaie à l'éther, alcool, chloroforme, solution iodée sous forme de teinture ou de solution aqueuse ou eau de Javel diluée au 1/10ème (contact de 15 minutes) : on évitera de la suturer immédiatement ; se rendre au centre de consultation antirabique le plus proche qui procèdera : - à un rappel de vaccin antitétanique (la salive des animaux peut en effet contenir le bacille tétanique) - à une nouvelle désinfection de la peau - à une injection immédiate de sérum antirabique (assurant une protection immédiate mais de courte durée) suivie, quelques heures après, d'une première injection de vaccin antirabique en cas de blessures importantes des doigts, des pieds, de la face. Parallèlement, il faut capturer l'animal que le vétérinaire examinera. Si l'animal est vivant, il sera placé sous surveillance vétérinaire. S'il est mort, sa tête sera envoyée à l'Institut Pasteur pour établir le diagnostic de la rage. |
La prévention de la rage = Prophylaxie
La lutte contre la rage animale s'effectue avec succès depuis plusieurs années (vaccination orale des renards par des appâts et vaccination des animaux domestiques). Il est recommandé de ne pas s'approcher ni de capturer des chauve-souris, qui sont par ailleurs une espèce protégée. La vaccination préventive chez l'homme est préconisée pour certaines catégories professionnelles (vétérinaires, gardes-chasses, équarrisseurs...). Elle est également recommandée chez le voyageur se rendant en zone d'endémie. Elle peut être réalisée par tout médecin.
Les opérations de lutte contre la rage passaient par l'élimination des renards. Actuellement, les campagnes de destruction par gazage des terriers sont remplacées par des campagnes de vaccination par voie orale (largage par hélicoptères d'appâts contenant le vaccin). Des essais de vaccination de renardeaux capturés au terrier avaient été réalisés dans une réserve naturelle d'Allemagne et dans le canton de Genève. Ce type d'intervention étant très coûteux, c'est en 1978, lors de l'arrivée de la vague de rage vulpine, que l'on reprit la campagne de vaccination orale dans le canton de Valais.
la rage humaine C'est le 6 juillet 1885 que les Docteurs GRANCHER et VULPIAN appliquèrent chez l'homme, sous la direction de Louis PASTEUR, le premier traitement antirabique après exposition, c'est à dire après la morsure. la rage canine Pour lutter contre la rage canine, on procède à la vaccination préventive des chiens domestiques et à l'élimination des chiens errants. On utilise actuellement des vaccins antirabiques administrés par voie orale. la rage de la faune sauvage Protégés dans les pays industrialisés, inaccessibles dans les autres pays, l'élimination des animaux sauvages vecteurs ou réservoirs, est difficile. La première circulaire d'encouragement aux destructions des " nuisibles " date de 1954 mais c'est fin 1968 que vont commencer les grandes campagnes d'extermination. Le renard en fera alors largement les frais… On attire le renard par des charniers (fosses peu profondes contenant des viandes pourrissantes et recouvertes de terre, de rondins) auprès desquels on disperse des " gobes ", morceaux de viande contenant de la strychnine. Ces gobes tueront de nombreux autres animaux : blaireaux, putois, chats sauvages, fouines, belettes, hermines, martres. Avec les poussins de un jour bourrés de strychnine disséminés un peu partout en janvier 1969, en Meurthe et Moselle, il faudra rajouter à la liste des victimes de nombreux rapaces comme les buses, milans royaux , hiboux moyens ducs. Les gobes connaîtront des variantes avec les cubes de Maroilles (toujours fourrés à la strychnine). On gaze l'animal à l'aide de la chloropicrine (gaz de combat testé dans les tranchées pendant la guerre de 14-18) dont on imbibe un chiffon ficelé au bout de la longue perche introduite dans le terrier. C'est la mort en quelques minutes ou peu après si l'animal tente, pour éviter l'asphyxie, de sortir de son terrier où les fusils l'attendent. Beaucoup de blaireaux feront les frais de ces opérations de gazage. En 1975, l'acide cyanhydrique sous forme de Zyklon B sera utilisé. Rajoutons à cela les pièges et le fait que toute capture est primée jusqu'à 40 F la queue. Pour les renards, la grande campagne de destruction massive (deux millions sont tués entre 1968 et 1991) sera sans effet ! Par contre, la campagne de vaccination orale menée depuis quelques années semble être efficace en Europe de l'ouest. Pour la vaccination animale, on utilise un virus atténué qui a perdu son neurotropisme et devient capable d'infecter les lymphocytes des amygdales et des ganglions cervicaux, d'induire la formation de corps apoptotiques (puissants immunogènes) et d'accélérer la libération de nouvelles particules virales vaccinantes et de nucléocapsides aux propriétés de superantigènes et d'adjuvants puissants de vaccinations. Pour la vaccination par hélicoptère, on utilise un virus de vaccine recombinant exprimant les antigènes vaccinants du virus utilisé, incorporé dans des têtes de poulets. Des résultats probants : 1968 : 2227 Cas de rage diagnostiqués ; 1969 : 4212 ; 1989 : 4212 ; 1991: 2165 ; 1994 : 99 ; 1996 : 17 ; 1997 : 0 ; 1998 : 0 ou 1 (dernier cas vacciné) ; 1999 : 0. Les vaccins oraux ont donc permis l'éradication de la rage sauvage en Europe : au 10 mai 2001, la France est de nouveau considérée comme pays indemne de la rage. Si l'épizootie vulpine a disparu, elle laisse cependant la place à la rage des chauves-souris insectivores et même, de façon asymptomatique, des chauves-souris frugivores. Quelques conseils… Si on vit dans une zone infectée, il est très facile d'éviter tout risque de contamination en suivant ces quelques conseils : ne pas toucher, ne pas essayer de soigner un animal domestique dont le comportement a brutalement changé, qui présente des troubles de la locomotion, de la déglutition ou qui s'est battu avec un animal sauvage : appeler d'urgence le vétérinaire ; ne pas caresser, toucher un animal errant ; ne pas manipuler un animal trouvé mort : dans un cadavre, protégé de la lumière et de la chaleur du soleil, le virus peut continuer à vivre plus longtemps. |
Pour en savoir plus
Page sur la rage d'un site santé du Canada Liste des plus récents taux d'incidence de la rage dans le monde d'aprés santé au Canada |
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