Et le Tamaris pour décor ...
Moha se leva très tôt comme à son habitude, écarta la vieille couverture militaire, une vieille cacha héritée de son père qui a dû servir dans l'armée. L'horloge indiquait six heures du matin .Depuis qu'il avait fini ses études universitaires et obtenu sa licence ,sa vie était horriblement vide .Et pourtant il est obligé de se lever chaque jour que Dieu fait avec le chant du coq , pour être à l'heure au rendez-vous de la manifestation quasi-quotidienne que lui et les collègues de sa promotion organisent devant le parlement .Cela fait maintenant deux ans que cette situation perdure.
Deux ans déjà depuis qu'il avait quitté la faculté d'Oujda où il avait suivi ses études universitaires. Il pleut dehors, une averse matinale d'une pluie fine qui s'infiltrait par les jointures de la fenêtre et venait former une flaque déjà imposante au beau milieu de la pièce. Moha regarda longtemps cette flaque, s'étira, encore ensommeillé, mit ses pantoufles et entra dans le cabinet de toilettes .Là il prit son temps à lire un article de journal où l'on parle de la révolution en Tunisie. Il sortit et alla se laver abondamment pour chasser le reste de sommeil qui lui alourdissait encore les paupières, mit la bouilloire sur le petit butane qui occupait un coin de la pièce et commença à se raser la figure dans la glace .il pensa à son destin qui l'avait amené à se tortiller dans les quartiers malfamés de la capitale à attendre à l'infini un travail qui ne se pointe pas encore. En attendant il a pu se débrouiller un petit boulot d'étudiant comme correcteur dans un journal français de la place, on le paie à la ligne et cela lui fait une soixantaine de dirhams qu'il empoche à la fin de la journée en se sentant heureux d'avoir déniché ce maigre emploi, qui malgré tout suffisait pour l'instant à le loger et à le nourrir, quoique misérablement, en attendant mieux. L'avantage de cet emploi est qu'il lui laissait du temps libre, du moment qu'il faisait le travail tranquillement chez lui et le ramenait à la maison d'édition à l'heure prévue .Tout à ses pensées il s'écorcha le menton avec la lame de rasoir Bic, dont il s'était déjà servi une fois. La goutte de sang qui tomba sur le minuscule lavabo lui rappela la grève de Décembre 1982 avec tous ces blessés qui gisaient dans les couloirs après une intervention musclée de la police, il n'avait échappé à la bastonnade que par miracle. Il allait continuer son évasion lorsque le clapotement du couvercle de la bouilloire en furie lui rappela à la réalité .Il posa sa lame, prit la théière, y mit une poignée de graines de thé, emplit d'eau ajouta du sucre et reposa l'ustensile sur la butane.Il regarda son portable :7 h35 ,juste le temps de prendre son petit déjeuner et de filer vers la place de rassemblement où des copains à moto se chargeront de le déposer devant la parlement .Il sortit sa bouteille d'huile d'olive ,se versa un peu dans une assiette en argile ,ajouta une pincée de sel ,se versa du thé absinthé bien chaud et commença à mâcher rapidement les morceaux de pain.
Deux ans déjà depuis qu'il avait quitté la faculté d'Oujda où il avait suivi ses études universitaires. Il pleut dehors, une averse matinale d'une pluie fine qui s'infiltrait par les jointures de la fenêtre et venait former une flaque déjà imposante au beau milieu de la pièce. Moha regarda longtemps cette flaque, s'étira, encore ensommeillé, mit ses pantoufles et entra dans le cabinet de toilettes .Là il prit son temps à lire un article de journal où l'on parle de la révolution en Tunisie. Il sortit et alla se laver abondamment pour chasser le reste de sommeil qui lui alourdissait encore les paupières, mit la bouilloire sur le petit butane qui occupait un coin de la pièce et commença à se raser la figure dans la glace .il pensa à son destin qui l'avait amené à se tortiller dans les quartiers malfamés de la capitale à attendre à l'infini un travail qui ne se pointe pas encore. En attendant il a pu se débrouiller un petit boulot d'étudiant comme correcteur dans un journal français de la place, on le paie à la ligne et cela lui fait une soixantaine de dirhams qu'il empoche à la fin de la journée en se sentant heureux d'avoir déniché ce maigre emploi, qui malgré tout suffisait pour l'instant à le loger et à le nourrir, quoique misérablement, en attendant mieux. L'avantage de cet emploi est qu'il lui laissait du temps libre, du moment qu'il faisait le travail tranquillement chez lui et le ramenait à la maison d'édition à l'heure prévue .Tout à ses pensées il s'écorcha le menton avec la lame de rasoir Bic, dont il s'était déjà servi une fois. La goutte de sang qui tomba sur le minuscule lavabo lui rappela la grève de Décembre 1982 avec tous ces blessés qui gisaient dans les couloirs après une intervention musclée de la police, il n'avait échappé à la bastonnade que par miracle. Il allait continuer son évasion lorsque le clapotement du couvercle de la bouilloire en furie lui rappela à la réalité .Il posa sa lame, prit la théière, y mit une poignée de graines de thé, emplit d'eau ajouta du sucre et reposa l'ustensile sur la butane.Il regarda son portable :7 h35 ,juste le temps de prendre son petit déjeuner et de filer vers la place de rassemblement où des copains à moto se chargeront de le déposer devant la parlement .Il sortit sa bouteille d'huile d'olive ,se versa un peu dans une assiette en argile ,ajouta une pincée de sel ,se versa du thé absinthé bien chaud et commença à mâcher rapidement les morceaux de pain.
Son thé bu à la sauvette il enfila sa veste et s’engouffra par le long boyau qui servait de couloir et sortit dans une petite courette où il prit le temps d’enlever le couvercle du siphon ,en prévision d’une luie qui pouvait inonder sa chambre durant son absence .A quelques mètres il s’arrêta devant le marchande de pépites berbère à qui il tendit une pièce de cinq dirhams ,ce dernier lui mit presque immédiatement cinq cigarettes dans la mains ,comme s’il les avait réparées d’avance .Moha lui en fit la remarque en ironisant sur l’avarice des soussis ,mais l’autre ne broncha pas ,tellement il avait l’habitude qu’on le taquine de la sorte .Moha continua son chemin et se perdit dans la foule matinale qui déambulait vers la station de bus qui n’était pas très éloignée .Il attendit encore quelques minutes qu’il passa à parcourir la première page d’un journal qu’il s’offrait le luxe d’acheter une fois par semaine ,le mercredi ,à cause du supplément pédagogique .Cette fois-ci ce n’était pas un article d’éducation qui retint son attention ,mais l’absence de la fameuse chronique de Rachid Ninni sur la dernière page .A la place il y avait une page noire ,en signe de deuil ,sur laquelle était écrit en blanc que le célèbre journaliste avait été arrêté pour sa défense de la liberté d’expression. Sous le choc, Moha n’entendit pas le bus et c’est à la dernière minute qu’il se glissa entre les portes hydrauliques avant que celles-ci ne se renferment .Il se plaça tout contre la porte et attendit que les passagers montés avant lui veuillent bien avancer et lui laisser un peu de place.
Arrivé au terminus il descendit et tomba net sur Amnay qui l’attendait .Tout comme lui il était originaire du même petit bled,Tizi n’Imnayn, perdu sous les flancs d’une grosse colline dans le sud-est. Seulement Amnay avait le privilège de compter sur l’aide de son demi-frère qui s’était installé à Rabat depuis déjà un dizaine d’années .Il avait bien accepté d’héberger Amnay après la fin de ses études, en échange de menus services domestiques que celui-ci devait tacitement lui rendre .C’est avec la moto de ce demi-frère qu’il était venu chercher Moha au terminus de Bab el Had pour le transporter devant le parlement où devait se dérouler la manifestation. Tous les deux appartiennent à la même génération, celle de ces jeunes dont les yeux se sont ouverts directement sur les moyens de communication de masse révolutionnaires et qui sont prêts à tout pour bénéficier de leurs droits, dont le travail demeure pour l’instant le plus urgent.
Moha lança un azul bien appuyé à son ami, qui le lui rendit sur le même ton.Ils tenaient ainsi à chaque fois qu’ils se rencontraient ,trois fois par semaine au moins, de se saluer dans leur langue maternelle ,ils se sentaient plus proches ainsi et sentaient le courage d’affronter tous les dangers ,rien que par ce rappel de leurs sources amazighs, qu’ils ne pouvaient pas afficher aussi ostensiblement il y a seulement quelques années ,sans que quelqu’un ne les regarde de travers .Aujourd’hui ,bien de l’eau a coulé sous les ponts ,et bien leur langue soit encore enseignée ,à dessein ,de manière caricaturale ils sont sûrs que le train est en marche et que leur identité ne pouvait plus être perdue dans les méandres de l’Histoire ,occultée par une autre ,servie par une langue qu’ils ne peuvent pas encore prononcer sans provoquer le rire de leur auditoire …
(à suivre?)
(à suivre?)
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