cogitations dans un café de la capitale .


De : brahim wagmis (wagmis@menara.ma)
Envoyé : mar. 06/04/10 13:43
À : goulmimalive@live.fr

Chapitre 1

Il n'y a pas longtemps;j'étais à Rabat pour une affaire administrative;je ne me souviens plus de la date exacte mais je n'oublierai jamais les va-et-vient que j'ai faits d'un bureau à l'autre et d'un service à l'autre;un vrai calvaire;surtout avec ces calamités qui vous reçoivent avec des manières inhumaines comme des vautours affamés qui se jettent en un clin d'oeil sur leur proie faisant preuve d'une cruauté sans égale ou des vampires qui n'attendent que le moment propice pour étancher impitoyablement la soif qui étrangle leur respiration par le sang des victimes incapables de se défendre,bref de vrais suceurs du sang.
Éreinté et arrivé au bout de mes forces;je pris place dans un café au
centre-ville tellement pollué et agité dans l'attente de l'heure de la récupération de mon dossier.Nul n'inspire confiance en ville

,alors j'essaie d'être très prudent et de garder mon sang froid mais en vain;ma ruralité et mon ingénuité me trahissent;en plus tellement de définitions me viennent en tête ,toute une terminologie interminable que j'ai apprise de Sadik et que je rêve de voir un jour s'appliquer réellement.Sadik comme son nom l'indique est un ami fidèle,fils d'un ex-mokhazni qui n'est pas originaire de Goulmima mais qui y a grandi et qui parle tamazight parfaitement,un intellectuel bien calé qui lit beaucoup;il dévore toute sorte de livres qui lui tombent sous la main.On ne s'ennuie jamais avec lui,au contraire,on aime toujours l'écouter parler de n'importe quel sujet entamé.Bref;l'écouter est un vrai régale.En plus Sadik a un coté humain exceptionnel;sa tendresse,la vivacité de son âme,sa générosité et son altruisme extrême font de lui un homme adorable et estimé de tous.Son seul défaut c'est qu'il ne prend pas soin de lui;il vit pour les autres.Après la mort de son père et le mariage de ses soeurs ,il a préféré sacrifier sa vie à sa maman et rester célibataire malgré son âge avancé.
-"Toutes les femmes se ressemblent et sont toujours source de problèmes;alors j'opte pour ma mère qui a le paradis sous les pieds"m'a -
t-il dit un jour.
Notre ami
Zat qui était un collègue au même établissement avant de partir en "DVD" m'avait dit une fois"Sadik peut résoudre tous les problèmes de la Chine;cependant;si on ajoutait une personne à cette dernière faisant allusion à Sadik;celui-ci se perdrait et sa boussole se coincerait".
chapitre 2
Seul et ombrageux;j'avais besoin de quelqu'un avec qui parler;j'allais exploser;bref j'avais besoin de Sadik qui m'a souvent parlé de la décentralisation;du rapprochement de l'administration des citoyens et de l'nformatique et la nouvelle technologie au service de l'administration.Un tas de choses mais qui ont malheureusement fait grève sur le tas,aucun fait ne s'est déroulé favorablement selon mes espoirs et suivant les leçons de mon cher ami.Fallait-il alors prendre les risques d'un long voyage stressant à bord de cars meurtriers appartenant à des sociétés ou à des particuliers irresponsables ne voyant que leur intérêt lucratif pour en être conscient?! Pourquoi alors tout ce temps perdu loin de ma famille?A quoi sert toute cette paperasse pesante?Pourquoi alors toutes ces lourdes dépenses durant trois jours successifs ;de l'hôtel;aux petit-taxis et en terminant par les repas froids des restaurants qui manquent souvent d'hygiène et surveillance pouvant avoir des conséquences néfastes sur la santé?
Perdu dans cet océan de m...,un homme bien
vêtu vint essuyer la table;jolie cravate,belle chemise blanche et chaussures noires bien cirées,je me demandai alors si les rôles ne devraient pas être inversés.Chez nous,on peut passer des heures et des heures avant que la garçon vienne avec des habits sales et non conformes à son service,parfois même ,si on ne l'appelle pas ou si on ne le cherche pas à l'interieur du café on ne sera jamais servi.
-Bonjour.
-Bonjour;du thé bien à la menthe
stp.
-Dans un verre ou dans une
théière?
-Une
théière bien sur.
Il revint dans une minute comme si le thé avait
déjà été préparé;mon étonnement fut encore grand quand j'aperçus une toute petite théière et un minuscule verre comme des jouets à 12dh.
-Un autre jouet;pardon un autre verre
stp.
-Pourquoi faire?
-J'attends
Sadik.
-Si ton ami te rejoins ,il sera obligé de demander sa consommation.
-Ah bon! chez nous
meme à huit on partage une meme theière trois fois plus grande que celle-ci et à 3dh seulement,si tu sais bien faire des calculs tu sauras que je ne dépense que 12dh par moi,en plus nous sommes une société de partage;cela fait partie de notre culture et de notre éducation.Dés notre enfance on partageait le morceau du pain nu qu'on fait sortir dehors avec tous lesc amis de la rue"un morceau,fais-moi gouter" se disait-on les mains tendues ;aussi grand on partageait la meme cigarette"fais-moi fumer avec toi"se disait-on ;ou est le mal alors?On n'utilisait ni fourchette ni couteau ,on mangeait dans un même plat et on buvait d'un meme verre et on le fait encore.
-Oui monsieur;mais ici on paie beaucoup
d'impôts.
-Est ce que les
impôts n'ont pas la même valeur dans tout le pays?Ou y a t-il des coins ou on les paie pas
(chapitre 3)



Il alla servir un nouveau client mais j'étais sur qu'il reviendrait, je sentis qu'il était lui aussi victime de l'une des injustices qui font légion dans les administrations et mon intuition ne m'a pas trahit.
-Je crois que les choses sont claires,tous ceux qui ne paient pas les impots offrent des pots.
-Des pots-de-vin!oui,maladie incurable,perversion inhumaine qui ne cesse de s'infiltrer indument à travers les interstices de tous les services administratifs serrant les rangs avec la misère sans nous laisser aucune autre chance que de rentrer dans les rangs et nous soumettre à leurs exigences.
-Y a pire que ça,moi j'étais victime de mon patronyme à résonance amazigh.Un prof à la fac m'a humilié un jour malgré mon excellence.
-Mais tu es d'ou?
-Ouarzazate.
-Ah,c'est pourquoi le courant passe facilement entre nous ,moi je suis de Goulmima.
Tamazight commença, je me sentis finalement soulagé et libéré de ma peur.
-Avec un DESA en maths,j'ai frappé inutilement à toutes les portes,après plusieurs années d'attente devant le batiment du parlement j'ai été déseperé;finalement j'ai préféré faire ce boulot;au moins j'arrive à subvenir aux besoins da ma famille.
La discussion avec lui était precieuse et fructueuse.Après chaque service ,il venait me souffler une de ses aventures et de ses souffrances vécues à la fac et après durant les années de chomage;chose qui a suscité en moi des souvenirs d'une belle époque de ma vie.
L'heure d'achévement de son travail de ce jour arriva,il me salua et me quitta sans apporter le verre de Sadik.Cétait la régle et il ne faut pas lui en vouloir.
Juste après son départ,une autre régle vint s'appliquer,son remplaçant essuya encore une fois la table faisant signe qu'il fallait consommer ou changer de lieu.Une seule consommation toute la matiné ou toute la soirée ça n'existe pas en ville



(chapitre 4)
"Un café au lait" lui ai-je demandé.J'avoue et sans complexe que ce n'était pas ce que je voulais prendre mais en l'absence des appellations de toutes ces boissons onéreuses dans mon répertoire et qui ornaient dans une perspective de l'art toutes les tables qui m'entouraient c'était le choix qui me restait après le thé.
Les éclats de rire étourdissants me laissérent sans reaction et m'agacérent mais j'essayais de me convaincre que Sadik n'allait pas tarder à venir.Hélas;mon embarcation ne méritait pas le bon vent me semblait-il;quelqu'un que je ne souhaitais pas voir meme dans le reve s'amena;il a beaucoup changé et les symptomes d'une maladie chronique apparaissaient vivement sur son visage; je n'oublierai jamis Moha.Il est passé juste à coté de moi et j'étais sur qu'il m'a vu mais il s'installa dans un coin ou j'arrivais à le voir,vraiment le monde est petit.
Dans une periode donnée;une catégorie de nos jeunes qui devraient normalement etre fiers de leur identité amazigh changeaient leurs prénoms qu'ils jugaient dégradant et affaiblissant leur lumière devant leurs semblables citadins après le bac;surtout devant les filles.Moha en faisait partie et refusait à ce qu'on l'appele ainsi;il a préféré Farid,et il était vraiment unique comme le dénote son nouveau prénom.
Il été amené au ksar avec sa mère par son oncle maternel pour continuer ses études primaires après la mort de son père;homme laborieux décédé subitement trés jeune sans laisser derriére lui aucun sou.
Moha s'est intégré facilement dans sa nouvelle societé qui était à l'époque communautaire et les liaisons entre les gens de toutes les ethnies étaient très solides.
Son oncle qui était connu par ses actions bienfaitrices et caritatives quitta à son tour notre monde dans un accident de la circulation laissant derriére lui sa soeur et son neveu affronter leur sort et les malheurs de la vie tous seuls.
"Ma Itto" sa mère;une vraie tamazighte faisait tout ce qu'elle pouvait pour que son fils unique ne manque de rien.Dans les champs et dans les maisons ;elle travailait sans fatigue ni repos;Moha était son trésors et cela se comprend,lui à son tour était excellent à l'école,brillant dans toutes les matières personne ne pouvait se muserait à lui .Il était d'une intelligence remarquable et nul n'a eu le même parcours scolaire que le sien.

dernier chapitre .

Moha et "Ma Itto" étaient deux laborieux aussi qui travaillaient simultanément chacun dans son domaine pour le bonheur de l'autre.Pour moi,il était plus qu'un frére,avec lui j'ai partagé des moments tantot de bonheur et de plaisir,tantot de tristesse,bref on avait juré d'etre amis pour le meilleur et pour le pire.On était inseparables et feue maman l'appelait "la perle" au lieu de "fils de la veuve" comme l'appelaient les jaloux et les envieurs du ksar.En plus de sa timidité exagerée qui enflammait ses joues comme une fiévre atroce et de sa sensibilité sans frontiére à la gent féminine il avait un défaut qui était son grand refus de sa situation comme s'il avait une main dans son déstin,mais cela le poussait à faire encore des éfforts, je sentais à son interieur une énergie énorme et une essence inépuisable.
Les jours passérent et Moha décrocha son bac avec mention trés bien dans la section "sciences maths";il alla continuer ses études dans une grande école et devint Farid.Il termina ses années de formation avec brio et put avoir un job dans une grande boite ou il réussit à devenir l'homme numéro un grace à son enthousiasme et à sa compétence.Sa mère qui l'a toujours entouré d'amour et d'affection comme une mère- poule a cru que son calvaire prenait fin puisque son poussin s'est fait une place au soleil.Quant à moi j'ai rejoint ma ville natale que j'aime jusqu'à la moelle sans jamais couper avec lui.
Farid venait du temps à autre rendre visite à sa mère chaque fois dans une voiture de luxe ,il changeait de voitures comme si c'étaient des vélos et toutes les charmantes files du ksar attendaient de lui un geste ou au moins un regard.Elles se demandaient quand ferait-il son choix.
Chaque fois que j'allais voir "Ma Itto" elle implorait Allah le tout puissant afin qu'il éloigne de son fils tout malheur et surtout les filles de la ville et leur sorcellerie.Son grand souhait était de le voir épouser une jeune fille de ksar ou il a grandi et lui faire un mariage avec un grand "ahidous" jamais vu.Après chaque priére elle demandait sans cesse au bon Dieu de lui donner la chance de gouter aux délices de la présence de ses petits fils auprès d'elle.
Narjisse;joli prénom alléchant d'une femme de ménage qui venait nettoyer son bureau quotidiennement et qu'il croyait une proie facile.Elle était plus agée que lui et son teint jaunatre soupçonnait la présence d'anémie mais pour quelques moments de jouissance c'était pas grave pensait-il.
Fille d'un fellah des allentours de casa ,Narjisse n'a jamais été à l'école mais plus expérimentée que lui,habile qu'elle était ses manoeuvres dépassérent les priéres de "Ma Itto".Après un mariage sans célébration ,elle devint la maitresse,prit les choses en main et exerça son pouvoir sans pitié ni indulgence.
Sa première visite qui fut aussi la dernière à Goulmima était catastrophique et "Ma Itto" en tomba malade.Narjisse était déja enceinte; et sans raison ,elle grognait en arrachant ses cheveux et elle criait sans avoir honte"bled des mouches et de la poussiére".La "bru-te" ne tardait pas chaque fois que sa belle-mère digne du respect sortait des modestes WC de faire sortir de son sac un de ces chers atomiseurs de différents parfuns onéreux pour asperger le mouchoir qu'elle mettait sous son nez,mais quand il s'agit d'elle et pour satisfaire ses besoins naturels Moha la prenait en voiture chez un ami qui possédait une toilette anglaise.Son integration fut impossible ,Moha était dans un grand embarras et ses problémes s'entassérent.
Dés lors,les visites de Farid devenait de plus en plus rares,il lui arrivait de passer en service via Goulmima et par crainte de sa femme il glissait des lettres sous la porte pour sa mère.
L'état de santé de "Ma Itto"s'aggrava et elle mourrut sans que son fils assiste à ses funérailles;les voisins avaient fait le necessaire.
Aujourd'hui il vit seul après le mariage de ses deux enfants et après aussi la mort de Narjisse qui a succombé suite à une grave maladie qu'elle avait trainée avec elle pour des années longues de souffrance.
-Eh garçon réchauffe moi mon café stp.
-ça ne se fait pas en ville.
-Ah ok.
Je réglai l'addition,pris mon sac et laissai là mon verre de café sans meme le gouter....je n'avais plus d'appetit.
-Papa réveille-toi.
-Qu' y a t-il Youssef?
-3mi Sadik en voiture,il t'attend pour aller à Rabat

* Titre et vignette de goulmimalive

Commentaires

Anonymous a dit…
Début d'une plume en herbe,bonne continuation et bon courage et merci de bien vouloir partager avec nous ton séjour/voyage à Rabat.bon courage! YOUSSAD

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