Tizi n'Imnayen se distingue!!
Compte-rendu de la rencontre avec les ex-détenus du Mouvement Culturel Amazigh (MCA), organisée le 1/11/2008 par l'Association TILELLI en partenariat avec les associations Imal et Azetta au siège de la maison des jeunes à Tizi-n-Imnayen.
TIZI-N-IMNAYEN ACCUEILLE LES DETENUS POLITIQUES DU MCA APRES LEUR SORTIE DE PRISON
L'Association Tilelli de Goulmima, en partenariat avec les associations Imal et Azetta ont organisé le samedi 1/11/2008, au siège de la maison des jeunes une rencontre avec les militants du M.C.A, ex-détenus des prisons d'Imteghren et d'Ameknas. Une rencontre ouverte animée avec beaucoup de maestria par Mass Mbarek TAOUS et suivie par une assistance nombreuse et qui restera marquée d'une pierre blanche dans les annales de l'Histoire.
Malgré les caprices du thermomètre, tous les militants et les sympathisants du M.C.A ont tenu à braver l’averse de pluie torrentielle qui se poursuit sur tout le Sud-est pour assister à cette rencontre mémorable. La présence de tous ces militants réchauffait les cœurs par leur obstination, leur ardeur juvénile et leur bravoure.Après une courte période d'attente durant laquelle les belles chansons amazighes d'un certain Lounés ont tenu l'assistance en haleine, tout le monde se leva dans un élan de ferveur patriotique qu'on avait longtemps perdu dans les réunions des jeunes; dans un pays où le nationalisme sans fard devenait une monnaie peu courante. Les dix rescapés des prisons de l'opprobre firent leur entrée triomphale sous les ovations et les slogans d'une foule de jeunes dévoués corps et âme à la cause de leurs ancêtres amazighs et comme eux demeurés farouchement inaliénables. Une fois les dix ex-détenus assis à leurs places respectives, les hauts parleurs se déchaînèrent de tous leurs décibels à scander l'hymne patriotique kabyle sur les notes d'une marche militaire. Toute l'assistance arborant le symbole amazigh (aza) retenait son souffle dans un silence monacal que ne meublaient que les notes enflammées et envoûtantes de feu Lounes MATOUB.
L'animateur présenta d' abord les ex-détenus à l'assistance pour laquelle ils n'étaient point étrangers. Tous ceux qui s'intéressent effectivement et sans hypocrisie, de près ou de loin à la cause amazighe au Maroc et ailleurs connaissent ces visages emblématiques qui ont circulé sur tous les sites internet et dont les photos étaient fièrement arborées par les masses des imeghnassen dans tous les sit-in organisés à travers leur pays. Ensuite, Monsieur TAOUS s'engagea dans une introduction chronologique fortement documentée qu'il citait de mémoire sur le Mouvement Culturel Amazigh, ses débuts, ses déboires, ses luttes et ses succès dans ce combat auquel il s'est consacré sans relâche. Dans cet exposé de l'état des lieux, le présentateur rappela à tout le monde que" Tamazight n'est pas à vendre", un clin d’oeil probable malicieux aux assises du cinquième congrès amazigh apatride et bâtard qui se tenait le même jour à Ameknas dans les sofas, boosté par les fossoyeurs des mouvements identitaires sous l’égide du Makhzen amazighophobe. Monsieur TAOUS nota entre autres que c'était la première fois que des marches pour tamazight étaient organisées, non par L' IRCAM, mais par le MCA, notamment contre l'utilisation politique de l'amazighité. Il rappela les événements du 13 Mai 2007 à l'université d'Agadir à la suite desquels le pouvoir a incarcéré trente jeunes étudiants avant de récidiver à Imteghren (Errachidia pour les arabisés), le 22 mai de la même année où un bouquet de l'élite estudiantine a encore fait les frais de la politique ségrégationniste et exclusive de l'Etat. Monsieur TAOUS a ensuite répété que le véritable objectif de telles arrestations demeure en la réalité la volonté délibérée de faire taire les voix amazighes qui s'élèvent contre toute forme de marginalisation sur tous les fronts aussi bien culturel, économique que politique. Néanmoins, a-t-il ajouté que l'acharnement du pouvoir a produit un effet radicalement contraire à ses aspirations d'extirper le MCA de son environnement social puisque on observe une effervescence dans la création de comités de soutien dans pratiquement tous les sites névralgiques du Sud-Est. Comme preuve, il avança entre autre la succession des sit-in pour l'élargissement des prisonniers.
Il conclut que le Makhzen avait encore une fois raté son objectif, à voir toute l'assistance de plus en plus grande apportée à ce mouvement par la société civile. Après cette entrée en matière judicieuse qui s'imposait, du moment que cette activité était ouverte au public et qu'il y avait des personnes non initiées et qui ignoraient les annales du MCA, le présentateur donna la parole au représentant du comité de soutien des prisonniers à Imteghren, Monsieur Mustapha OUDANI qui réaffirma le but et la justification de ces arrestations visant la reconnaissance de Tamazight ainsi que son épanouissement à tous les niveaux, tant soit culturel, social qu'économique.
Son allocution qu’il voulut, à dessein, brève afin de laisser la parole aux ex-détenus, fut achevée sous les ovations reconnaissantes de l'assistance, qui estimait à sa juste valeur le rôle incontournable et efficace de ce comité de soutien dont il était membre, pour la continuité et le bon acheminement de toute forme d'assistance aux militants qui continuent de souffrir dans les geôles de L'Etat. L'animateur de cette rencontre, qui commençait dans la discipline la plus totale de la part de l'assistance malgré sa fougue juvénile, donna ensuite la parole aux ex-détenus. Ceux -ci commencèrent dans la majorité leurs allocutions par réaffirmer que le MCA qui est un mouvement pacifiste est aussi concerné par le volet économique et n'oublièrent pas, dans un perspicace esprit d'à propos, de clamer haut et fort la solidarité du Mouvement Culturel Amazigh avec les victimes des récentes inondations qui ont déferlé sur la quasi-totalité du pays. Ainsi, le premier intervenant, en l'occurrence Monsieur Saïd KANDOUL marqua la discordance totale et flagrante entre l’Etat marocain et le peuple marocain ; il avança à ce sujet que nous sommes face à "un Etat sans peuple et à un peuple sans Etat". Cet apophtegme significatif lui servit de rampe de lancement pour ses missiles de longue portée par lesquels il stigmatisa d'abord le Makhzen, qui a tendu un piège aux militants du MCA, avant de falsifier les procès-verbaux des interrogatoires à seule fin de pouvoir les faire passer en jugement pour un crime qu'ils n'ont jamais commis.
Tous les ex-détenus s'accordèrent à confirmer avec véhémence leur témoignage de vive voix contre les actes barbares, les sévices et les humiliations de toutes sortes dont ils furent victimes depuis les premiers jours de leur incarcération."Ils nous ont traités, dirent-ils de Chlouh lkhanzine (sales Chleuhs), ils nous ont torturés, cependant, toutes ces tortures tant bien morales que physiques n'ont pas eu raison de notre détermination à continuer sur la même voie de la contestation pacifique pour faire entendre la voix de Tamazight, la voix de la raison". Dans un effort intense de retenue devant la charge émotionnelle du moment, ils remercièrent tous ceux qui ont soutenu les prisonniers durant leur calvaire et l'un d'entre eux ajouta "nous avons purgé quatre mois de prison pour rien, le Makhzen a cru en nous emprisonnant que nous étions le MCA mais ce mouvement a continué malgré notre incarcération. On dit que nous avons tué, nous n'avons tué personne; les journaux ont menti à notre égard sous les instructions de nos tortionnaires, ils ont divulgué des inepties et des mensonges, alors qu'en réalité le véritable mobile de ces arrestations était la défense de la cause amazighe!"
Un autre intervenant, MonsieurYidir AIT LKAID réitéra que leur arrestation n'était en somme qu'une tragique mise en scène bien concoctée pour les inculper. De même qu'il réitéra la tendance non belliqueuse du Mouvement Culturel Amazigh, rappelant que ce mouvement a été l'initiateur d'un pacte pacifiste dans l'enceinte universitaire.
L'intervenant suivant, Monsieur Youssef AIT LBACHA débuta son intervention par un hommage solennel aux vrais martyrs de Tamazight. Il affirma que les questions, lors des interrogatoires ne concernaient nullement le meurtre pour lequel ils ont été interpellés mais portaient sur des questions d'ordre politique. Ils (policiers) voulaient savoir, dit-il qui écrivait en Tifinagh, qui finançait le mouvement et qui organisait les rencontres."Ils ont amené, continua-t-il "une vieille vagabonde (chemkara) pour qu'elle témoigne contre nous, mais elle s'est contredite dans ses allégations ". Il raconta enfin comment l'un de ses avocats a même demandé pour lui les circonstances atténuantes alors que, dit-il "je n'ai commis aucun meurtre!"
Kamal JEBBOUR, quant à lui, d'emblée, clama haut et fort que le pouvoir n'est pas marocain, que le mensonge a toujours été une constante entre gouvernants et gouvernés dans ce pays depuis des siècles. Il dénonça ensuite la politique de l'intégration adoptée par l'Etat vis-à-vis des Imazighens par le truchement d'institutions telles que l' IRCAM et consoeurs. Il reconnut la difficulté d' extirper l' idéologie arabe qui date de plus de quatorze siècles mais n' oublia pas de rendre hommage au MCA qui est, ajouta-t-il, une véritable école et qui a réussi à briser tous les arguments du pouvoir et ses tabous.
Younès HEJJA a, de son côté, suivi une démarche scientifique médico-légale avec une attestation médicale dûment signée pour détruire toutes les accusations portées contre les étudiants du MCA. Il arbora devant l'assistance ladite attestation qui les disculpait et dans laquelle le médecin légiste confirmait que "les vêtements d'Oussaya, (l'un des détenus, toujours incarcéré à Ameknas), ne révèlent que ses propres empreintes génétiques". Il ajouta aussi que c'était là un emprisonnement pour raisons exclusivement politiques.
Le représentant d’Azetta Amazigh, co-organisatrice de cette activité, Monsieur El JAZOULI fit un bref commentaire de cette situation en déclarant qu'il n' était nullement surprenant d'être emprisonné au Maroc et invita l'assistance à réfléchir et à s' interroger sur ce qu' il fallait faire en réaction à cette situation.Messieurs Mohamed CHAMI et Amar OUDDI saluèrent successivement aussi les martyrs, notamment Assou Ou Baslam, Abdelkerim, Matoub et soulignèrent que le MCA lutte contre le mépris "la hogra", l'injustice et que les périodes passées dans les geôles makhzéniennes n'ont nullement atténué l'ardeur de leur fidélité aux principes pour lesquels ils ont toujours milité.
"Le Makhzen a mis des gants, mais c'est toujours le même ", scanda Mohamed ZEDDOU quand il prit le micro des mains de son voisin. Il adressa un vibrant hommage aux victimes de l'insouciance dans le village d'Anefgou. Il critiqua ensuite le timing de la visite royale dans ce village, qui a eu lieu à la belle saison et non pendant l'hiver, saison des souffrances et des privations pour les autochtones. Il enchaîna par un hommage destiné aux habitants de Goulmima qui, dit-il, "détestent l'Etat et nous donnent des leçons dans ce sens". Concernant la constitution, il fit remarquer qu'il n’y avait pas de place pour les Imazighen et que nous parlons une langue qui n'est totalement pas la nôtre.
Le dernier des ex-prisonniers à avoir pris la parole fut Monsieur Mhemd OUTANOUT qui rapporta que le tribunal qui les avait jugés avait lui-même reconnu que les procès-verbaux avaient été falsifiés. Il rapporta sa propre expérience avec l'incarcération injuste ainsi que le caractère tardif de cette dernière qui était survenue une année après le crime dont on l'accusait. Lui aussi affirma son innocence et assura que la véritable raison de sa dernière interpellation était surtout sa participation active aux meetings et aux mouvements de protestation contre l'arrestation de ses collègues. Il acheva son intervention par le refus catégorique de passer outre ce qu'on leur avait tous fait subir:"ma dernière phrase, dit-il, est que nous ne pardonnerons jamais à ceux qui ont contrefait les procès verbaux injustement contre nous!!"
Pour clore cette soirée de témoignage vivant et pour que toutes les parties concernées s'expriment librement en public, pour empêcher également toute exploitation malintentionnée qui tendrait à interpréter la position des parents des détenus, les associations organisatrices ont judicieusement planifié un témoignage représentatif des parents des ex-détenus. Ce fut le vénérable père de Younes HEJJA qui prit la parole et, s'adressant à la foule de jeunes qui suivaient attentivement les interventions, il leur cria:"vous les jeunes, vous êtes tous prisonniers, vous risquez tous d'être emprisonnés à chaque instant!", il remercia vivement les associations organisatrices ainsi que tous les Goulmimiens. Il termina par une pointe d'humour sarcastique, en racontant comment il avait rétorqué à des policiers qui voulaient l'interroger en arabe et insistaient pour qu'il réponde dans cette langue:"j'ai répondu que je ne suis pas en Arabie Saoudite pour parler en arabe" et sa phrase se termina sous les ovations de l'assistance qui saluait son courage et sa ténacité de père qui avait toujours bravé avec sérénité toutes les tentatives d'intimidation.
P.S.: A mon tour je remercie vivement les associations qui ont collaboré pour organiser cette activité mémorable qui m'a permis, ainsi qu'à bon nombre de Gherissois d'écouter ces vibrants témoignages. Je rends un grand hommage à tous nos imeghnassen qui ont résisté aux tortures et aux humiliations de toutes sortes, à leur solide conviction en la légitimité de la lutte contre toute forme de ségrégation dans notre propre patrie, le grand Tamazgha.
Unna ttuγ issuref-i. Tanemirt!
Vive le M.C.A indépendant!!
Tizi-n-Imnayen le 5/1/2008
Aziz BOUFOUS
TIZI-N-IMNAYEN ACCUEILLE LES DETENUS POLITIQUES DU MCA APRES LEUR SORTIE DE PRISON
L'Association Tilelli de Goulmima, en partenariat avec les associations Imal et Azetta ont organisé le samedi 1/11/2008, au siège de la maison des jeunes une rencontre avec les militants du M.C.A, ex-détenus des prisons d'Imteghren et d'Ameknas. Une rencontre ouverte animée avec beaucoup de maestria par Mass Mbarek TAOUS et suivie par une assistance nombreuse et qui restera marquée d'une pierre blanche dans les annales de l'Histoire.
Malgré les caprices du thermomètre, tous les militants et les sympathisants du M.C.A ont tenu à braver l’averse de pluie torrentielle qui se poursuit sur tout le Sud-est pour assister à cette rencontre mémorable. La présence de tous ces militants réchauffait les cœurs par leur obstination, leur ardeur juvénile et leur bravoure.Après une courte période d'attente durant laquelle les belles chansons amazighes d'un certain Lounés ont tenu l'assistance en haleine, tout le monde se leva dans un élan de ferveur patriotique qu'on avait longtemps perdu dans les réunions des jeunes; dans un pays où le nationalisme sans fard devenait une monnaie peu courante. Les dix rescapés des prisons de l'opprobre firent leur entrée triomphale sous les ovations et les slogans d'une foule de jeunes dévoués corps et âme à la cause de leurs ancêtres amazighs et comme eux demeurés farouchement inaliénables. Une fois les dix ex-détenus assis à leurs places respectives, les hauts parleurs se déchaînèrent de tous leurs décibels à scander l'hymne patriotique kabyle sur les notes d'une marche militaire. Toute l'assistance arborant le symbole amazigh (aza) retenait son souffle dans un silence monacal que ne meublaient que les notes enflammées et envoûtantes de feu Lounes MATOUB.
L'animateur présenta d' abord les ex-détenus à l'assistance pour laquelle ils n'étaient point étrangers. Tous ceux qui s'intéressent effectivement et sans hypocrisie, de près ou de loin à la cause amazighe au Maroc et ailleurs connaissent ces visages emblématiques qui ont circulé sur tous les sites internet et dont les photos étaient fièrement arborées par les masses des imeghnassen dans tous les sit-in organisés à travers leur pays. Ensuite, Monsieur TAOUS s'engagea dans une introduction chronologique fortement documentée qu'il citait de mémoire sur le Mouvement Culturel Amazigh, ses débuts, ses déboires, ses luttes et ses succès dans ce combat auquel il s'est consacré sans relâche. Dans cet exposé de l'état des lieux, le présentateur rappela à tout le monde que" Tamazight n'est pas à vendre", un clin d’oeil probable malicieux aux assises du cinquième congrès amazigh apatride et bâtard qui se tenait le même jour à Ameknas dans les sofas, boosté par les fossoyeurs des mouvements identitaires sous l’égide du Makhzen amazighophobe. Monsieur TAOUS nota entre autres que c'était la première fois que des marches pour tamazight étaient organisées, non par L' IRCAM, mais par le MCA, notamment contre l'utilisation politique de l'amazighité. Il rappela les événements du 13 Mai 2007 à l'université d'Agadir à la suite desquels le pouvoir a incarcéré trente jeunes étudiants avant de récidiver à Imteghren (Errachidia pour les arabisés), le 22 mai de la même année où un bouquet de l'élite estudiantine a encore fait les frais de la politique ségrégationniste et exclusive de l'Etat. Monsieur TAOUS a ensuite répété que le véritable objectif de telles arrestations demeure en la réalité la volonté délibérée de faire taire les voix amazighes qui s'élèvent contre toute forme de marginalisation sur tous les fronts aussi bien culturel, économique que politique. Néanmoins, a-t-il ajouté que l'acharnement du pouvoir a produit un effet radicalement contraire à ses aspirations d'extirper le MCA de son environnement social puisque on observe une effervescence dans la création de comités de soutien dans pratiquement tous les sites névralgiques du Sud-Est. Comme preuve, il avança entre autre la succession des sit-in pour l'élargissement des prisonniers.
Il conclut que le Makhzen avait encore une fois raté son objectif, à voir toute l'assistance de plus en plus grande apportée à ce mouvement par la société civile. Après cette entrée en matière judicieuse qui s'imposait, du moment que cette activité était ouverte au public et qu'il y avait des personnes non initiées et qui ignoraient les annales du MCA, le présentateur donna la parole au représentant du comité de soutien des prisonniers à Imteghren, Monsieur Mustapha OUDANI qui réaffirma le but et la justification de ces arrestations visant la reconnaissance de Tamazight ainsi que son épanouissement à tous les niveaux, tant soit culturel, social qu'économique.
Son allocution qu’il voulut, à dessein, brève afin de laisser la parole aux ex-détenus, fut achevée sous les ovations reconnaissantes de l'assistance, qui estimait à sa juste valeur le rôle incontournable et efficace de ce comité de soutien dont il était membre, pour la continuité et le bon acheminement de toute forme d'assistance aux militants qui continuent de souffrir dans les geôles de L'Etat. L'animateur de cette rencontre, qui commençait dans la discipline la plus totale de la part de l'assistance malgré sa fougue juvénile, donna ensuite la parole aux ex-détenus. Ceux -ci commencèrent dans la majorité leurs allocutions par réaffirmer que le MCA qui est un mouvement pacifiste est aussi concerné par le volet économique et n'oublièrent pas, dans un perspicace esprit d'à propos, de clamer haut et fort la solidarité du Mouvement Culturel Amazigh avec les victimes des récentes inondations qui ont déferlé sur la quasi-totalité du pays. Ainsi, le premier intervenant, en l'occurrence Monsieur Saïd KANDOUL marqua la discordance totale et flagrante entre l’Etat marocain et le peuple marocain ; il avança à ce sujet que nous sommes face à "un Etat sans peuple et à un peuple sans Etat". Cet apophtegme significatif lui servit de rampe de lancement pour ses missiles de longue portée par lesquels il stigmatisa d'abord le Makhzen, qui a tendu un piège aux militants du MCA, avant de falsifier les procès-verbaux des interrogatoires à seule fin de pouvoir les faire passer en jugement pour un crime qu'ils n'ont jamais commis.
Tous les ex-détenus s'accordèrent à confirmer avec véhémence leur témoignage de vive voix contre les actes barbares, les sévices et les humiliations de toutes sortes dont ils furent victimes depuis les premiers jours de leur incarcération."Ils nous ont traités, dirent-ils de Chlouh lkhanzine (sales Chleuhs), ils nous ont torturés, cependant, toutes ces tortures tant bien morales que physiques n'ont pas eu raison de notre détermination à continuer sur la même voie de la contestation pacifique pour faire entendre la voix de Tamazight, la voix de la raison". Dans un effort intense de retenue devant la charge émotionnelle du moment, ils remercièrent tous ceux qui ont soutenu les prisonniers durant leur calvaire et l'un d'entre eux ajouta "nous avons purgé quatre mois de prison pour rien, le Makhzen a cru en nous emprisonnant que nous étions le MCA mais ce mouvement a continué malgré notre incarcération. On dit que nous avons tué, nous n'avons tué personne; les journaux ont menti à notre égard sous les instructions de nos tortionnaires, ils ont divulgué des inepties et des mensonges, alors qu'en réalité le véritable mobile de ces arrestations était la défense de la cause amazighe!"
Un autre intervenant, MonsieurYidir AIT LKAID réitéra que leur arrestation n'était en somme qu'une tragique mise en scène bien concoctée pour les inculper. De même qu'il réitéra la tendance non belliqueuse du Mouvement Culturel Amazigh, rappelant que ce mouvement a été l'initiateur d'un pacte pacifiste dans l'enceinte universitaire.
L'intervenant suivant, Monsieur Youssef AIT LBACHA débuta son intervention par un hommage solennel aux vrais martyrs de Tamazight. Il affirma que les questions, lors des interrogatoires ne concernaient nullement le meurtre pour lequel ils ont été interpellés mais portaient sur des questions d'ordre politique. Ils (policiers) voulaient savoir, dit-il qui écrivait en Tifinagh, qui finançait le mouvement et qui organisait les rencontres."Ils ont amené, continua-t-il "une vieille vagabonde (chemkara) pour qu'elle témoigne contre nous, mais elle s'est contredite dans ses allégations ". Il raconta enfin comment l'un de ses avocats a même demandé pour lui les circonstances atténuantes alors que, dit-il "je n'ai commis aucun meurtre!"
Kamal JEBBOUR, quant à lui, d'emblée, clama haut et fort que le pouvoir n'est pas marocain, que le mensonge a toujours été une constante entre gouvernants et gouvernés dans ce pays depuis des siècles. Il dénonça ensuite la politique de l'intégration adoptée par l'Etat vis-à-vis des Imazighens par le truchement d'institutions telles que l' IRCAM et consoeurs. Il reconnut la difficulté d' extirper l' idéologie arabe qui date de plus de quatorze siècles mais n' oublia pas de rendre hommage au MCA qui est, ajouta-t-il, une véritable école et qui a réussi à briser tous les arguments du pouvoir et ses tabous.
Younès HEJJA a, de son côté, suivi une démarche scientifique médico-légale avec une attestation médicale dûment signée pour détruire toutes les accusations portées contre les étudiants du MCA. Il arbora devant l'assistance ladite attestation qui les disculpait et dans laquelle le médecin légiste confirmait que "les vêtements d'Oussaya, (l'un des détenus, toujours incarcéré à Ameknas), ne révèlent que ses propres empreintes génétiques". Il ajouta aussi que c'était là un emprisonnement pour raisons exclusivement politiques.
Le représentant d’Azetta Amazigh, co-organisatrice de cette activité, Monsieur El JAZOULI fit un bref commentaire de cette situation en déclarant qu'il n' était nullement surprenant d'être emprisonné au Maroc et invita l'assistance à réfléchir et à s' interroger sur ce qu' il fallait faire en réaction à cette situation.Messieurs Mohamed CHAMI et Amar OUDDI saluèrent successivement aussi les martyrs, notamment Assou Ou Baslam, Abdelkerim, Matoub et soulignèrent que le MCA lutte contre le mépris "la hogra", l'injustice et que les périodes passées dans les geôles makhzéniennes n'ont nullement atténué l'ardeur de leur fidélité aux principes pour lesquels ils ont toujours milité.
"Le Makhzen a mis des gants, mais c'est toujours le même ", scanda Mohamed ZEDDOU quand il prit le micro des mains de son voisin. Il adressa un vibrant hommage aux victimes de l'insouciance dans le village d'Anefgou. Il critiqua ensuite le timing de la visite royale dans ce village, qui a eu lieu à la belle saison et non pendant l'hiver, saison des souffrances et des privations pour les autochtones. Il enchaîna par un hommage destiné aux habitants de Goulmima qui, dit-il, "détestent l'Etat et nous donnent des leçons dans ce sens". Concernant la constitution, il fit remarquer qu'il n’y avait pas de place pour les Imazighen et que nous parlons une langue qui n'est totalement pas la nôtre.
Le dernier des ex-prisonniers à avoir pris la parole fut Monsieur Mhemd OUTANOUT qui rapporta que le tribunal qui les avait jugés avait lui-même reconnu que les procès-verbaux avaient été falsifiés. Il rapporta sa propre expérience avec l'incarcération injuste ainsi que le caractère tardif de cette dernière qui était survenue une année après le crime dont on l'accusait. Lui aussi affirma son innocence et assura que la véritable raison de sa dernière interpellation était surtout sa participation active aux meetings et aux mouvements de protestation contre l'arrestation de ses collègues. Il acheva son intervention par le refus catégorique de passer outre ce qu'on leur avait tous fait subir:"ma dernière phrase, dit-il, est que nous ne pardonnerons jamais à ceux qui ont contrefait les procès verbaux injustement contre nous!!"
Pour clore cette soirée de témoignage vivant et pour que toutes les parties concernées s'expriment librement en public, pour empêcher également toute exploitation malintentionnée qui tendrait à interpréter la position des parents des détenus, les associations organisatrices ont judicieusement planifié un témoignage représentatif des parents des ex-détenus. Ce fut le vénérable père de Younes HEJJA qui prit la parole et, s'adressant à la foule de jeunes qui suivaient attentivement les interventions, il leur cria:"vous les jeunes, vous êtes tous prisonniers, vous risquez tous d'être emprisonnés à chaque instant!", il remercia vivement les associations organisatrices ainsi que tous les Goulmimiens. Il termina par une pointe d'humour sarcastique, en racontant comment il avait rétorqué à des policiers qui voulaient l'interroger en arabe et insistaient pour qu'il réponde dans cette langue:"j'ai répondu que je ne suis pas en Arabie Saoudite pour parler en arabe" et sa phrase se termina sous les ovations de l'assistance qui saluait son courage et sa ténacité de père qui avait toujours bravé avec sérénité toutes les tentatives d'intimidation.
P.S.: A mon tour je remercie vivement les associations qui ont collaboré pour organiser cette activité mémorable qui m'a permis, ainsi qu'à bon nombre de Gherissois d'écouter ces vibrants témoignages. Je rends un grand hommage à tous nos imeghnassen qui ont résisté aux tortures et aux humiliations de toutes sortes, à leur solide conviction en la légitimité de la lutte contre toute forme de ségrégation dans notre propre patrie, le grand Tamazgha.
Unna ttuγ issuref-i. Tanemirt!
Vive le M.C.A indépendant!!
Tizi-n-Imnayen le 5/1/2008
Aziz BOUFOUS
Commentaires